Distinguer responsabilité et culpabilité
Sophie, en réponse à votre courriel,
Je me souviens d'avoir entendu Arnaud Desjardins faire la distinction entre responsabilité et culpabilité. Le responsable répond. En tant que mère vous vous sentez responsable de l'éducation de vos enfants. Vous répondez à ce que demande leur éducation. Et pas toujours à leur attente à eux. Vous répondez aux situations le plus justement possible.
Comment sait-on que l'on n'est pas dans la justesse ? Quand l'émotion est présente, l'action (la réponse à la situation) n'est pas juste. Il s'agit d'une réaction et non pas d'une action dans ce cas.
La culpabilité, c'est autre chose. Elle appartient au sens de l'ego qui s'attribue en permanence les actes et leurs conséquences. Il y avait la mère d'une cliente qui grosso modo disait : "si tu réussis, c'est grâce au ciel, si tu échoues, c'est de ta faute". De quoi se sentir coupable. D'autres vivent à l'inverse. Vous connaissez cette histoire ? Un homme fait le tour du pâté de maison à la recherche d'une place de parking. N'en trouvant pas, il demande l'aide de dieu. Mon dieu, 10 euros si tu me trouves une place de parking ! Toujours sans résultat, il augmente sa proposition : 100 euros si tu me trouves une place... Toujours rien mais la situation devient urgente, il va être en retard à son rendez-vous, il améliore sa proposition, dieu, mille euros pour toi si tu me trouves une place de parking ! Une place se libère alors devant lui... et l'homme s'écrie : Mon dieu, plus la peine de chercher, j'ai trouvé !!!
C'est comme cela que fonctionne l'ego. C'est sa vanité. Il s'attribue tout ce qui arrive, dans un sens comme dans l'autre. "Je m'attribue le malheur de mes enfants". Dans quel but ? Est-ce utile ? Non, cela ne fait que renforcer la souffrance. Mais c'est son fonctionnement. Au-delà du psychologique, vous avez à guérir de l'ego. "La psychologie, c'est guérir l'ego, la spiritualité, c'est guérir de l'ego".
Donc, quand la culpabilité est là, revenez à la responsabilité. Quels sont les faits ? Que puis-je faire pour répondre au mieux à la situation avec ce que j'en connais, ce que j'en perçois ? C'est une action et vous faites ce que vous pouvez à ce moment là. Quelquefois, vous aimeriez faire plus et mieux alors faites-le et si vous ne le faites pas c'est que les circonstances ne vous le permettent pas. Et si vous ne le faites pas alors que vous pourriez le faire, on peut supposer que c'est pour répondre au désir de donner raison à vos parents. Ils avaient raison, vous êtes une mauvaise fille etc. Et pourquoi leur donner raison ? Pour qu'ils se souviennent de leurs fautes, de leurs manquements. La réalité, c'est qu'ils ne se souviendront de rien, tout ce dont ils se souviendront, c'est la photo de leurs enfants sur le canapé qui justifie leur bonheur (!).
Donc pseudo action complètement inutile, continuer à souffrir pour pouvoir continuer à leur reprocher ne les fera pas changer. Vous devez maintenant vous en convaincre. Maintenir cette souffrance ne vous apportera rien. Vous pouvez la quitter. Mais il est vrai qu'en la quittant, vous quittez une amie de toujours. Vous abandonnez la petite fille qui a eu mal. Essayez d'accueillir sa douleur. Essayez d'accueillir la vôtre. Mais il est possible que cette petite fille soit éperdue et que ne puissiez plus rien pour elle. Dans ce cas, elle réclamera toujours, inconsolable. Alors, vous devrez la quitter parce que malgré tout l'amour que vous lui portez, vous ne pouvez plus rien pour elle alors qu'en tant que mère vous avez encore beaucoup à faire dans le présent.
Vous ne pourrez jamais réparer le passé. Mais vous pouvez essayer d'en être libre en quittant ce qui vous attache à lui. En reconnaissant dans votre chair les douleurs passées. Au-delà, vous ne pouvez rien faire sauf de revenir au présent et agir en répondant aux situations.
Francis